Ces derniers temps, j’ai pris un peu de recul par rapport à la blogosphère (terme déjà obsolète depuis quelques années 🙂 ). L’été, c’est génial pour se ressourcer et se la couler douce. Néanmoins, je n’ai pas fait que chômer sous un parasol. J’ai aussi pensé à écrire quelques billets.

Pour finir la saison chaude, je vous propose une série d’articles concernant les formes et la géométrie en photographie. Vous le savez sans doute, pour moi être photographe, c’est savoir composer une photo. La technique, c’est important, mais ce n’est pas LE plus important. Ceux qui ont déjà bénéficié de mes conseils dans le cadre d’une formation en ligne s’en sont aussi aperçus 🙂 🙂 🙂 Je ne vous parlerai pas une énième fois de la règle des tiers, on va se concentrer sur la géométrie. Tous les quatre jours, je publierai un exemple pour différents thèmes (architecture, composition centrée, contrejour, géométrie urbaine, la nature en gros plan, composition minimaliste, urbex)

Pour composer une photo, il faut savoir jongler avec les formes qui se présentent à notre regard. La géométrie est omniprésente dans tout notre environnement, qu’il soit urbain ou naturel. Il est donc essentiel d’apprendre à la discerner et à composer avec elle. Finalement, en tant que photographe, notre tâche la plus importante est peut-être de savoir observer et capturer convenablement l’univers des formes.

Le premier précepte qu’il faut considérer est que le monde dans lequel nous vivons est défini par plusieurs dimensions : la hauteur, la largeur et la profondeur (en langage mathématique : x, y et z). Lorsque nous prenons un cliché, la réalité est donc forcément déformée. En photographie, nous sommes en effet techniquement incapables de reproduire la troisième dimension de l’espace. Il est très important de toujours garder cela à l’esprit  : le résultat d’une prise de vue est la projection lumineuse sur une surface plane de ce qui existe réellement. Il faut alors apprendre à voir en deux dimensions.

Le fait qu’une photographie ne représente finalement qu’une vision aplatie du monde est une donnée extrêmement importante. En effet, si on observe un cliché en faisant abstraction de certaines informations liées aux motifs, on s’aperçoit alors qu’une image est en réalité une succession de formes simples, de lignes courbes ou de droites. Dans cet enchevêtrement géométrique, certaines figures sont plus marquées que les autres. Ce sont elles qui constituent la charpente visuelle de l’image.

Nous devons nous exercer à schématiser ce que nous voyons dans notre environnement afin d’y déceler un potentiel graphique. D’ailleurs, nous n’avons pas concrètement besoin d’avoir constamment un appareil photo pour le faire. Minor White, photographe du milieu du xxe siècle, déclarait à ce propos : « Je ne cesse de photographier mentalement, à titre d’entraînement. » À force de pratique, il est possible de simplifier une scène afin de la considérer sous l’aspect de formes géométriques. En un instant, il faut alors imaginer comment disposer ces dernières dans le cadre pour obtenir le bon arrangement. Cela peut sembler compliqué en théorie, mais les automatismes s’acquièrent rapidement. À ce titre, réaliser un traitement de nos clichés en noir et blanc est aussi un exercice intéressant. Il permet en effet d’enlever les informations liées à la couleur, ce qui laisse apparaître plus facilement la structure de l’image.

Le type d’agencement géométrique le plus commun est la composition dite « en triangle ». En photographie en effet, nous avons un temps limité pour réaliser le cadrage. Les décisions doivent être prises rapidement et cette forme est probablement la plus présente et la plus simple à identifier. Ils permettent principalement d’orienter le regard de manière très efficace. À cet égard, soyez vigilant, car l’orientation du triangle a son importance et peut induire des messages différents. Lorsque la pointe est orientée vers le haut, cela donne au spectateur une impression de stabilité. Dans certains cas, cela permet aussi de restituer une perspective. À l’inverse, si la pointe du triangle est orientée sur le côté ou vers le bas aura tendance à induire une notion de déséquilibre et/ou de mouvement (la base sur laquelle la figure devrait tenir en équilibre est désormais en haut. Inconsciemment, cela induit un manque de stabilité).

D’autres solutions existent. Il y a celle qui consiste par exemple à ne se servir que d’un seul point d’ancrage pour le regard. Le reste de l’image est alors occupé par le vide ou un motif ayant une texture uniforme. Ce type de cadrage est souvent utilisé pour évoquer l’apaisement, la tranquillité ou pour suggérer la solitude. On parle de composition minimaliste. Nous pouvons aussi avoir recours à la symétrie pour obtenir un cadrage parfaitement équilibré. Enfin, il est possible de tenter de complexifier l’image en multipliant les points forts avec des figures géométriques de plus en plus complexes. Attention cependant, car dans ce cas, la lecture de l’image peut s’avérer plus confuse et l’observateur aura peut-être plus de mal à capter le message s’il n’est pas clairement explicité.

Nikon D750 – Sigma Art 50mm f/1,4 DG HSM – 1/4000s – f/1,4 – 100 Iso

Ici l’ossature de l’image est caractérisée par trois formes triangulaires. À gauche, le fil électrique et le toit du cabanon forment un triangle dont la pointe est orientée à droite. Le regard a donc tendance à suivre cette direction. L’arbre pointe quant à lui vers le bas. Il canalise donc l’œil qui aurait peut-être tendance à vouloir s’évader vers le registre supérieur de l’image. Le motif le plus important est défini par les deux chevaux. Ces derniers forment aussi un triangle depuis l’arrière-train de l’un jusqu’à la tête du second. Il pointe vers le centre de l’image. S’il avait été orienté différemment, vers la droite, le regard serait resté bloqué sur le bord de l’image.

Nikon D750 – Tamron SP 70-200mm f/2,8 Di VC USD G2 – 1/200s – f/4,5 – 3200 Iso

Pour cette image, le triangle le plus grand a la pointe vers le haut. Ici, il n’oriente pas la lecture, car les sujets sont assez forts pour retenir le regard au centre. En revanche, il caractérise la stabilité, un abri dans lequel les animaux se sentent en sécurité. La face des chatons définit deux autres petits triangles. Cette fois, ils sont orientés vers le bas et induisent une certaine fragilité des deux jeunes félins.

Suggérer la profondeur : pour donner une impression de perspective dans une photo en deux dimensions, il s’agit de cadrer judicieusement. La manière la plus évidente est de se servir des lignes les plus marquées pour recréer de la profondeur. Un motif triangulaire avec le sommet orienté vers le haut est particulièrement efficace. Il peut s’agir d’un chemin, d’une rivière, une ligne de côte, une rambarde… Une autre méthode consiste à recourir à une grande ouverture de diaphragme. La faible profondeur de champ ainsi créée engendre un arrière-plan flou, qui suggère une troisième dimension.

Nikon D750 – Nikon AF-S 28 mm f/1,8G – 1/320s – f/3,2 – 640 Iso

Cette photo est un classique du genre. Les lignes matérialisées par les rails permettent de restituer de la profondeur. Notez également que le traitement en noir et blanc accentue le graphisme de l’image.

Un commentaire

  1. Bonjour Denis,
    C’ est ce qu’ on appelle la composition pyramidale en peinture si je ne me trompe.
    C’ est vrais que lorsqu’ on arrive a  » découper  » ce que l’ on photographie on arrive , avec un peu d’ habitude , à obtenir de images bien équilibrées mettant bien en évidence le(s) sujet(s).
    Bonne journée,
    Francis

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