Certains d’entre vous ont peut-être déjà entendu parler du Miksang…?

Le Miksang est une pratique photographique basée sur l’enseignement bouddhiste tibétain. Il se concentre sur la capture de la beauté de l’environnement immédiat tel qu’il est, sans chercher à le changer ou à l’améliorer de quelque manière que ce soit.

La pratique de Miksang repose sur l’idée que nous avons tendance à voir le monde de manière séparée et fragmentée, plutôt que de voir la beauté et la perfection de l’ensemble. Le Miksang nous aide à voir le monde d’une manière plus holistique, en nous invitant à voir la beauté dans les choses les plus simples et les plus ordinaires de notre environnement.

Si je m’intéresse à ce courant photographique, c’est que par certains aspects, je me sens assez proche de cette démarche

Si certains d’entre vous connaissent bien le Miksang, je vous prie de me corriger si vous pensez que la définition que j’en donne est imprécise. L’espace commentaire est fait pour ça. 

Miksang en Tibétain peut se traduire par “bon oeil”, mais il ne faut pas comprendre le mot “bon” comme l’inverse de “mauvais” (j’ai aussi trouvé d’autres auteurs qui traduisent : « images pures »). Cela signifie plutôt que l’esprit est libre d’autres préoccupations, détendu et disponible. Selon ce schéma, il faudrait concevoir le monde sans a priori, en tentant de se détacher de toute notion de valeur, de plaisir, d’aversion ou de désintérêt. La prise de vue photographique doit se dérouler dans cet état d’esprit.

La pratique de Miksang comporte trois éléments clés : la perception pure, la composition pure et l’expression pure. La perception pure implique de voir le monde d’une manière non filtrée et non jugée, tandis que la composition pure consiste à utiliser des techniques de composition pour mettre en valeur la beauté de l’environnement. L’expression pure est l’application de ces perceptions et de ces compositions pour créer des images qui reflètent la réalité telle qu’elle est.

Le Miksang est également souvent associé à la pratique de la méditation, car il encourage les photographes à être présents et conscients de leur environnement. Il invite à être attentif aux détails et à la beauté de l’environnement, plutôt que de se concentrer sur la recherche de sujets ou de scènes à photographier.

Cette définition est une sorte de condensé de mes lectures sur le sujet. Pour exercer le Miksang, il faudrait donc être dans un état méditatif en quelque sorte. Cependant, contrairement à une méditation classique, le Miksang est une pratique active et l’appareil photo (et la photo elle-même) est un moyen, pas un but. En résumé, le Miksang, c’est la philosophie ZEN appliquée à la photographie

Je ne suis pas certain qu’être bouddhiste soit une condition sine qua non pour exercer le Miksang. Cette religion est plus proche d’une doctrine philosophique et je pense qu’on peut revendiquer pratiquer le Miksang sans pour autant ne jamais être allé dans un temple bouddhiste ou avoir suivi les enseignements d’un moine.

Le Bouddhisme m’intéresse pour ses concepts pleins de sagesse et l’ouverture d’esprit dont cette religion fait preuve, mais cela ne va pas plus loin. Ce n’est pas parce que je suis moi-même bouddhiste que je m’intéresse au Miksang.

La vraie raison est que lorsque j’ai découvert cette pratique, j’ai trouvé de nombreux points communs avec le style que j’avais défini au fil du temps. Par bien des égards, la photographie est pour moi le moyen de me ressourcer. Lors de la prise de vue, j’essaie d’être totalement dans le moment présent et je tente de mettre de côté le “mental” pour laisser plus de place à “l’instinctif”. Autant vous dire qu’il s’agit probablement d’une douce utopie, mais l’intention est là. 

Si vous avez déjà feuilleté l’un de mes livres, vous savez certainement que je prône la culture de l’image et le fait de conceptualiser certains aspects de la pratique photographique. Pourtant, lors d’une séance de prise de vue, je tente de ne pas trop intellectualiser le procédé. Je me laisse porter par l’ambiance. 

À ce stade, c’est l’inconscient qui prend le relais. Il va de soi qu’on reste imprégné de notre personnalité, de tous les concepts que nous avons consciemment mis en place. Néanmoins, en se détachant de nos préoccupations passés et futur, on laisse plus de place au hasard et à la surprise. C’est ainsi que l’on est plus créatif et que l’on peut se permettre de sortir de certains schémas étriqués. 

J’ai une affection particulière pour les compositions minimalistes tirées au cordeau, iconiques et parfois un peu esthétisantes. C’est surtout en cela que ma pensée diffère de celle du Miksang. Car ceux qui pratiquent cette “discipline” produisent des images plus proches de la sensation et la réussite de leurs images n’est pas toujours explicable de manière évidente. 

En outre, ce n’est pas le sujet qui est important, mais plutôt la manière dont on le perçoit. Il existe un exercice qui consiste à se figer en un point et à observer longuement autour de soi. Il s’agit de s’imprégner de l’ambiance, du lieu et de se laisser guider par ce que l’on ressent. 

Les photos produites sont forcément subjectives. Il n’y a pas de dogme, c’est la pratique qui compte, pas le résultat. De fait, je ne pense pas que quelqu’un regardant une série de photographies puisse assurément dire celles qui ont été produites dans le cadre de cette pratique ou non. 

Depuis que j’ai programmé la rédaction de cet article, j’ai souhaité réaliser l’exercice plus intensément. Je suis donc sorti de ma “zone de confort” afin de tenter l’expérience et voir ce que je pouvais en tirer. 

Les images illustrant cet article matérialisent donc le résultat de cette pratique. 

Que m’a apporté cet exercice ?

En essayant de ne pas intellectualiser l’acte photographique, on se laisse plus facilement porter par le hasard (même si celui-ci n’existe pas 🙂 🙂 🙂 , mais c’est un autre débat ). 

On est plus facilement attiré par une forme, l’ombre d’un objet sur un mur, une couleur, une lumière...etc. Et cela suffit à faire une photo. Comme je le disais, les images produites proposent une sensation, une émotion simple et directe. Néanmoins, elles ont quand même du sens et c’est bien là le principal.

Ce dont je suis certain, c’est que je ne ferai pas du Miksang ma pratique photographique principale. Je suis fermement attaché à mon univers que j’ai mis du temps a trouvé et qui me correspond. En revanche, le fait de trouver des points communs entre le Miksang et ma vision de la photographie montre que je peux y puiser une forme d’inspiration et de créativité.

Comme je le prône dans mon livre “les secrets du style en photographie”, un style ne doit pas être figé et il faut laisser assez de place pour le faire évoluer progressivement. 

Si vous n’êtes pas familier avec ce genre de pratique, je vous suggère donc de tenter l’aventure et me donner votre sentiment. 

N’oubliez pas que l’espace commentaire est fait pour vous exprimer. Vous pouvez aussi m’envoyer vos images à denis.dubesset@gmail.com. Je suis curieux de voir si vos résultats sont à mille lieues des miens ou si finalement ils se ressemblent.

Je publierai ces images dans un post et nous pourrons commenter ensemble vos œuvres. N’ayez pas peur de participer, il n’y a que de la bienveillance sur ce site 🙂

Cette fois, il n’y a pas de lot à gagner, mais l’échange n’est-il pas le meilleur des cadeaux ? 

Je n’ai pas trouvé de livre sur le miksang spécifiquement, mais ces deux ouvrages que je possède en reprenne les principes :

Un livre qui a connu beaucoup de succès aux Etats Unis, en anglais
La philosophie zen appliquée aux arts visuels. En anglais également

https://www.miksang.com/

une discussion autour du Miksang https://qastack.fr/photo/11740/what-is-miksang-photography

10 commentaires

    1. Author

      Salut, oui Patrice
      Mais y’a-t-il un bon et un mauvais regard. Vaste débat, mais moi je pense qu’il n’y a pas de mauvais regard.
      Merci pour le lien, je suis allé y faire un tour. Je pense que l’auteur de cette page n’est pas toujours en adéquation avec la philosophie « Miksang ». Néanmoins, comme la définition de ce concept est subjective…pourquoi pas.
      Je vais rajouter des références à l’article, car j’ai omis de le faire.

  1. Merci Denis pour cet article fort intéressant sur ce concept qui ne l’est pas moins.
    Pour ma part , je me laisse porter par l’ambiance généralement, il me faut du temps pour trouver un certain calme et un détachement . J’essaie de traduire mes émotions en appuyant sur le déclencheur mais je pense qu’il y a toujours une part de réflexion , je ne pense pas avoir ce  » laisser aller » .! Mais je vais y songer!

    1. Author

      Salut Eric, comme tu le dis, ce n’est pas simple de décrocher et de se laisser aller, mais l’essentiel c’est d’essayer. L’idée c’est de tenter d’appréhender différemment la prise de vue afin de sortir d’un schéma préétabli.

  2. Bonjour , hé bien non … je ne connaissais pas ! je trouve cet article hyper intéressant ! j’en comprends le principe …je vais tester ce week end .
    Merci

  3. Bonsoir Denis, je viens de découvrir ton article qui me parle beaucoup car sans le savoir je pense pratiquer cette « philosophie » photographique depuis mes débuts. D’ailleurs dans ma bio sur mon site je précise bien que « j’appréhende le monde souvent plus par mes sens que par ma raison » et quand je photographies c’est pareil, le ressenti d’une ambiance est la condition sine qua non pour me décider à appuyer sur le déclencheur ou pas. Je prends toujours le temps de m’imprégner de l’endroit, parfois j’ai l’impression d’être dans un état très particulier 😊. La technique est nécessaire mais n’est pas au premier plan…en fait elle vient de manière naturelle en fonction de ce que je ressens.
    Je disais aussi dans l’une de mes séries que « mes photos sont le spectre de mes émotions et l’appareil en est le révélateur ».
    Est-ce un peu tout cela le miksang ?
    Merci Denis pour cette sorte de révélation 😉😁

    1. Author

      Salut Nathalie,
      Effectivement je connais un peu tes images et il est vrai que l’on peut ressentir cette approche. Je pense que ce que tu décris est tout à fait proche du Miksang effectivement.
      Certains, comme toi, le font instinctivement. Je pense aussi à William Eggleston qui colle bien à cette description également.
      Merci à toi d’avoir partagé ton expérience.

  4. Bonsoir Denis
    Je viens de lire l’article c’est une sensation étrange ça m’a propulsé dans mon enfance, adolescence ou enfant rêveur, contemplative je faisais de la peinture de façon intuitive. J’ai essayé avec la photo mais par ma situation je suis toujours à courir pour faire des photos, je ne prend plus le temps de rêver de m’imprégné de l’atmosphère. Et la avec 1h par jour à pourvoir sortir….😕
    Même quand je fais des photos plus abstraites (toujours plein de couleurs ) avec des mise en scène dans ma cuisine, j’ose pas partager en pensant que je ne vais pas être comprises.

    1. Author

      Merci pour ton commentaire Ana.
      Connaissant un peu tes photos, je pense qu’elles sont déjà bien contemplatives.
      Ceci dit j’ai envie de te conseiller de faire les photos qui te plaisent. Peu importe si elles ne correspondent pas à ce que les autres attendent.
      Tu dis que tu n’oses pas partager, mais partager nos photos sur internet n’est pas une obligation. De plus je suis sûr que quelques-uns ne comprendront pas, mais que d’autres adoreront 🙂 🙂 🙂


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